Thursday, October 15, 2009

Bakchich.info: Devejian, 20 ans de lutte contre la Cité Universitaire



Article de Benjamin König paru dans Bakchich.info

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http://www.bakchich.info/Devedjian-20-ans-d-acharnement,08951.html#nh1


Les élus au conseil de la Communauté d’agglomération des Hauts-de-Bièvre ont examiné un deal soumis par les sous-lieutenants de Devedjian pour raser une bonne partie de la plus grande Cité U d’Europe. Enquête.

Les étudiants virés sans ménagement du bâtiment C de la Cité universitaire d’Antony, durant l’été, ne seront pas les derniers. Car d’ici 2013, ce ne sont pas moins de 5 bâtiments sur sept – le B avait déjà été détruit en 1986 – qui vont être rasés, partiellement ou en intégralité, selon le vote [1] vendredi 9 octobre de la Communauté d’agglomération des Hauts-de-Bièvre (CAHB) présidée par Georges Siffredi, le suppléant à l’Assemblée de Patrick Devedjian. Soit la disparition de plus de 8% des logements sociaux étudiants dans toute l’Île-de-France !

Pensez donc : 2051 logements à des prix défiant toute concurrence : 137 euros la chambre, 220 le T2. Une aubaine, alors que la situation du logement étudiant est catastrophique, notamment dans la région parisienne. Les vénérables bâtiments de Jean Zay, dans ce contexte, ne seraient pas de trop. Mais ils se retrouvent accusés de tous les maux. Trop petits, trop vétustes, dangereux pour la sécurité de nos chères têtes blondes, et même pire : figurez-vous que ces bâtiments ne seraient pas écologiques. Quand on veut tuer son chien, on dit qu’il a la rage…

Or, tous ces arguments, quand on gratte un peu le béton, ne tiennent pas la route. Un rapport commandé par la CAHB elle-même à l’entreprise Socotec le précise.



L’ensemble des bâtiments ne présente pas de dangerosité immédiate. Surtout s’ils étaient rénovés. Et la résidence est classée « D » sur l’échelle écolo qui va de A à H. Pas ridicule du tout pour ce type de bâtiments, qui pourraient se retrouver mieux notés encore après réhabilitation.

"UNE VOLONTÉ POLITIQUE"

Autre exemple : les chambres de 10,8m², avec les sanitaires dans les couloirs, sont déclarées « trop petites ». Quelle touchante attention… dans le même temps, le Crous inaugure des chambres bien rénovées, comprenant réfrigérateur et sanitaires, dont la superficie atteint… 10m². Encore plus ubuesque : le protocole prévoit pour les bâtiments D et F une réhabilitation partielle, le reste de ces bâtiments devant être démoli. Faut-il en déduire que ces immeubles ne sont abimés que d’un côté ? « L’argument ne tient pas la route, soupire Marie-Jo Weil-Ehrhard, présidente de l’Association des amis de la résidence universitaire d’Antony (AARUA). De toute façon, détruire la résidence est une volonté politique de Devedjian. Tout le reste n’est que prétexte. » Il faut accorder au ministre de la Relance une qualité : l’obstination. « L’idée n’est pas nouvelle, témoigne une membre du collectif de défense de la résidence, qui préfère garder l’anonymat. Dès 1983, Devedjian voulait s’attaquer à la Cité U. » Et il ne s’en est jamais caché. En 1989, alors maire d’Antony, il déclarait à Libé : « Cette cité s’est développée comme un kyste. » Et remettait le couvert quelques jours plus tard, dans Le Parisien, dans un article au surtitre sans équivoque : « Plaidoyer du maire d’Antony pour réduire le site des deux tiers. »

Depuis, il n’a eu de cesse de s’acharner sur la Cité U comme un chien sur une vieille pantoufle. Quitte à user de moyens légaux qui en disent long sur la conception de la morale politique de lui-même et de ses acolytes. En 2004, il fait voter une loi nationale autorisant le transfert de propriété des résidences universitaires entre le Crous et les collectivités locales. « Il a fait une loi nationale pour son intérêt local », s’indigne notre membre du collectif. Mais il faut croire que les années d’études en droit de notre bon ministre, à Assas, n’ont pas servi à grand-chose : l’article de loi est mal rédigé, et le transfert rejeté par le Crous de Versailles. Qu’à cela ne tienne. En 2006, un ami qui lui veut du bien vient à sa rescousse : un amendement est adopté en catimini par le Sénat, dans une loi sur la fonction publique territoriale. Brice Hortefeux, alors ministre des Collectivités locales, s’adresse en ces termes pour le moins cyniques au sénateur qui a déposé l’amendement : « Et ne manquez pas de transmettre toutes nos amitiés et notre bon souvenir à Patrick Devedjian. » Ce qui déclenche l’hilarité sur les bancs de l’UMP. Ah, l’humour auvergnat…


UN TRANSFERT AUX FORCEPS


La brèche enfin ouverte, la CAHB s’y est engouffrée tel l’amiral Nelson à Trafalgar. Le 11 janvier dernier, le transfert de propriété devenait réalité. Et, cette fois-ci, le Crous de Versailles n’a pas pu s’opposer : malgré une délibération négative de son CA, le transfert s’est fait de force. « S’ils n’ont rien dit, c’est qu’ils ont dû avoir des pressions de Devedjian et de Pécresse (ministre de l’Enseignement supérieur qui a la tutelle sur le Crous, ndlr) », ajoute notre membre du collectif. En mars dernier, un recours a bien été déposé contre ce transfert de propriété, mais la date de la décision du tribunal n’est pas encore connue. Alors Devedjian et ses affidés ne perdent pas de temps, et tentent de passer en force. En moins de 10 mois, c’est la destruction de la moitié de la résidence qui est entérinée. Car le vote de vendredi ne fait pas de doute : l’UMP y détient une large majorité. « Mais nous déposerons des recours », prévient Marie-Jo Weil-Ehrhard.

Les acolytes associés des Hauts-de-Bièvre ne perdent pas une occasion de gagner la bataille de l’information. Détail cocasse : sur la fiche wikipedia de Georges Siffredi, un passage met la puce à l’oreille. Les trois dernières phrases reprennent mot pour mot l’argumentaire de la CAHB et des démolisseurs associés. En regardant l’historique de l’article, on s’aperçoit que le passage en question a été modifié le 1er septembre dernier à 10h52. Auparavant, le passage en question était nettement moins dithyrambique : « En juin 2009, en tant que président de la CAHB, il lance l’opération de démantèlement de la résidence universitaire Jean Zay d’Antony. » Ça la foutait mal, sans doute. Mais qui est donc le membre « Jpmpmacm », auteur de cette fameuse correction ? Difficile de le savoir : son adresse IP n’a pas été enregistrée. Un détail cependant : le même, à 11 h 53, a ajouté… une photo de Georges Siffredi. Un opposant, sans doute, qui lui trouve si belle mine…

Et demain ? Rien n’est encore clair. Une chose est sûre : ces terrains valent cher. Un projet d’"écoquartier" a bien été évoqué, avec une crèche et 30 % de logements sociaux. Mais nul ne sait de quoi il retourne. Et puis, 30 % de social, ça fait toujours 70 % pour les autres. Et hop ! De la belle mixité sociale !

Document : le protocole adopté par la CAHB le vendredi 9 octobre 2009:



1 comment:

  1. Les raseurs de résidences bon marché ne s'arrêteront pas là. Après Jean Zay, ce sera Vincet Fayo et la résidence de Centrale, qui seront rasées et qui seront remplacées par de luxueuses promotion immobilière, qui permettront de faire venir en nombre de bons électeurs UMP.
    Dehors les pauvres !

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